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Homme à la mer MOB (5/5) - Alain Bombard, le naufragé volontaire

Alain Bombard reste célèbre dans le monde de la mer pour ses expériences menées sur lui-même dans ses recherches sur la survie en mer. Connu sous le surnom du “Naufragé volontaire”, ce médecin d’après-guerre se persuada que la survie en mer était possible, sans vivres...

Homme à la mer MOB (5/5) - Alain Bombard, le naufragé volontaire

Le naufrage du Notre Dame de Peyragudes

Bombard raconte que l’origine de son obsession pour la survie en mer remonte à ses années passées à Boulogne-sur-Mer, où, jeune interne en médecine, il aurait autopsié les nombreuses victimes (41 dans ses souvenirs) du naufrage d’un chalutier, le Notre-Dame de Peyragudes. Les marins, jeunes et vigoureux ne semblaient pas avoir lutté, mais s’être noyés, sans espoir de survie.
Bien que les archives des affaires maritimes fassent état de 10 noyés et 6 survivants, la réalité de ce naufrage est avérée. Par la suite, ayant rejoint l’Institut Océanographique de Monaco, où il dispose d’un laboratoire, il y développa sa théorie de la survie en mer.

La théorie de la survie en mer de Bombard

Homme à la mer MOB (5/5) - Alain Bombard, le naufragé volontaire

Il affirme que les naufragés, persuadés de l’issue fatale de leur condition, sont fortement affectés sur le plan psychologique et que cette affection, menant à une rapide dépression, les entraîne à rompre la lutte et se laisser mourir.
Il imagine une théorie de la survie en mer et énonce des principes d’alimentation et d’hydratation devant favoriser la survie des naufragés.
Pour lui, l’issue du naufrage n’est pas automatiquement fatale.
La consommation d’eau de pluie, d’eau de mer et de poisson pressé permettraient de s’hydrater tandis que le poisson cru et le plancton filtré constitueraient une alimentation compatible avec la survie.
Il met en lumière l’importance de la dimension psychologique dans ce combat pour la survie qui se veut d’abord intérieur.

Se placer dans les conditions d’un naufragé

Homme à la mer MOB (5/5) - Alain Bombard, le naufragé volontaire

Sur son pneumatique souple de 4,65 m, ouvert, sans vivres, muni d’un équipement de pêche simpliste, Alain Bombard quitte, le dimanche 19 Octobre 1952, l’Île de Gran Canaria, en direction de l’Ouest.
Son canot portait le nom fameux de “L’hérétique”, sa démonstration s’opposant aux principes de survie en mer en vogue depuis des siècles...
Ne rencontrant pas de pluie durant les 22 premiers jours de son voyage, il se nourrit de plancton filtré avec sa chemise et s’abreuve de jus de poisson pressé.

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Sa position lui est inconnue. Elle lui sera indiquée par un navire de passage, avec une erreur est de 600 milles Est par rapport à son estime ! Il refusa toutefois l’aide dudit navire acceptant seulement un déjeuner en pleine mer.
La suite du voyage est un calvaire.
Sans boire une seule goutte d’eau de pluie durant plus de 20 jours, à l’article de la mort, Bombard rédige son testament à bord le 6 décembre.
Malade, déprimé, déshydraté, il est de surcroît dysentérique. La pêche et mauvaise et il déguste des oiseaux de mer, pris à la ligne, crus.

Il avance péniblement vers l’ouest, à une allure d’un nœud, écrasé de soleil, perclus de douleurs, en proie aux hallucinations, à la faim et la soif, croisant requins et autres cétacés.

Terre !

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Après 113 jours de mer, le 23 décembre 1952, il touche terre à La Barbade, dans un état semi-comateux.
Après une longue hospitalisation, il subira l’ablation d’un rein.
Il publiera, en 1953 “Naufragé Volontaire”, sa relation de son aventure, qui connaîtra un succès mondial et pose les bases de techniques de survie en mer.

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Etel, neuf noyés

Sa récente renommée nautique le fit approcher par un fabricant de canots pneumatiques, l’Angevinière. Pour la petite histoire, cette société prendra le nom de “Bombard” en 1972.

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Pour le compte de l’Angevinière, il devait prouver la capacité de manœuvre, tous temps, de ces nouveaux pneumatiques.
C’est ainsi qu’il tenta de franchir la “barre d’Etel”, un banc sous-marin, un jour de fort coefficient de marée, par gros temps, sur un de ses canots.
C’est le drame : le canot pneumatique et le canot de sauvetage envoyés à son secours chavirent et neuf habitants d’Etel sont noyés, mais pas Bombard qui est blanchi de toute responsabilité.
Très affecté par ce drame, il entra dans un période de dépression sévère.

Naturellement versé dans l’écologie, il rejoindra le gouvernement Mauroy comme Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l'Environnement, mais démissionnera, suite aux propos de ce dernier sur la chasse à courre, à laquelle il était personnellement opposé.

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Il est décédé à Toulon, à l'âge de 80 ans le 19 Juillet 2005 et repose à Bandol.
Même si les contradicteurs de Bombard eurent beau jeu de critiquer tel ou tel point de détail de son voyage effarant, n’oublions pas que cet homme eut le cran, afin de démontrer sa théorie de la survie en mer, de s’astreindre à une expérience réelle sur un canot que nous aurions aujourd’hui nommé annexe, et que l’expérience en question impliquait une transatlantique, en solitaire, sans vivres et sans moyens de communication !

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