15 Mai 2025
La décision de la SPL Ports de Fréjus de mettre un terme, dès le 2 août prochain, à la gestion déléguée du chantier naval de Port-Fréjus, pour en reprendre temporairement la maîtrise directe, fait l’effet d’un électrochoc. Jusqu’ici exploité par une entreprise privée dans le cadre d’un contrat de délégation de service public (DSP), le chantier devait théoriquement fonctionner sous ce régime jusqu’en 2025. Mais la SPL a choisi de ne pas reconduire le contrat, préférant gérer elle-même l’aire de carénage dans l’attente d’un nouvel appel d’offres prévu pour une DSP de cinq ans.
Cette transition, assortie d’une réduction drastique des effectifs — seulement quatre postes seraient maintenus sur vingt-cinq —, est perçue comme brutale. L’actuel exploitant, informé tardivement selon ses dires, dénonce une décision précipitée, prise sans concertation ni véritable justification économique. Il souligne que l’activité du chantier génère un chiffre d’affaires annuel d’environ 700 000 euros et remplit des fonctions essentielles, telles que la mécanique, la peinture, la rénovation et le carénage des bateaux.
L’entreprise estime que sa suppression fragiliserait l’équilibre global du port, notamment face à la concurrence d’autres infrastructures régionales. L’arrêt de ces services techniques pourrait également détourner les plaisanciers, en quête d’entretien régulier, vers d’autres ports. En l’état, selon l’exploitant, Port-Fréjus ne disposerait ni des capacités logistiques ni de l’organisation interne nécessaires pour assumer cette baisse d’activité.
La SPL justifie sa décision par un projet de modernisation. Elle évoque des travaux à venir sur les digues, condition préalable au lancement d’un nouvel appel d’offres. Mais elle ne précise ni le calendrier, ni les modalités d’accompagnement pour les salariés affectés par cette réorganisation. Cette opacité alimente la défiance.
Dans les rangs de l’opposition municipale, la décision suscite également des critiques. Plusieurs élus dénoncent une gestion unilatérale et mal préparée, risquant de nuire à l’image du port et à son attractivité. Ils regrettent un manque d’anticipation, alors même que le contrat en cours reste théoriquement valable.
Le litige pourrait aussi prendre une tournure juridique. L’exploitant conteste la volonté de la collectivité de récupérer certains équipements présents sur le site. Ces matériels, qu’il affirme avoir acquis en 2011 lors de la reprise du chantier, serviraient désormais de base à la future régie sans compensation prévue. Une procédure judiciaire est envisagée pour faire valoir ses droits.
Dans un contexte déjà tendu pour le secteur du nautisme et de la plaisance, confronté à des enjeux de rentabilité et de transition écologique, cette affaire met en lumière les limites de certaines méthodes de gestion publique. Entre ambitions de modernisation et risques de désorganisation, la transition engagée à Fréjus interroge sur la gouvernance des infrastructures portuaires et la capacité des collectivités à mener des réformes structurelles sans rupture.