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Canal de Bourgogne : l’incertitude grandit autour de la navigation entre Venarey et Pouilly

Menacé de rupture, un tronçon central du canal de Bourgogne suscite tensions et inquiétudes entre collectivités et gestionnaire national.

photo - Adobe Stock J Aufort

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Le tronçon du canal de Bourgogne reliant Venarey-les-Laumes à Pouilly-en-Auxois cristallise les inquiétudes. Sa fréquentation jugée insuffisante relance un débat de fond sur les priorités d’entretien du réseau fluvial français. En toile de fond : des arbitrages budgétaires, des enjeux patrimoniaux, et la crainte d’une perte d’attractivité durable pour tout un territoire.

Ce secteur, situé au cœur du département de la Côte-d’Or, pourrait voir la navigation interrompue à partir de janvier 2026. Cette perspective résulte d’un désaccord persistant entre Voies Navigables de France (VNF) et les collectivités territoriales concernées. L’établissement public invoque la nécessité d’un soutien financier local pour maintenir ce tronçon opérationnel, ce que les acteurs locaux refusent de prendre à leur charge exclusive.

Les collectivités locales rappellent qu’elles sont déjà engagées dans la valorisation des abords du canal. Des investissements réguliers ont été réalisés pour sécuriser certains sites sensibles, développer une véloroute adjacente, et mettre en place une signalétique adaptée. Elles jugent que ces efforts illustrent leur volonté de préserver et d’animer ce patrimoine, mais estiment que l’entretien structurel du canal incombe à l’État.

En l’absence d’accord, les collectivités n’excluent pas de nouvelles initiatives, mais conditionnent leur implication à une stratégie nationale cohérente. Certaines envisagent par exemple la réhabilitation d’écluses désaffectées pour les convertir en hébergements touristiques, ou la création de points d’étape pour cyclotouristes et plaisanciers, dans une logique de valorisation intégrée du canal et de ses abords.

La possible fermeture de la navigation sur cette section du canal suscite également des craintes dans le secteur touristique. De nombreux professionnels redoutent les effets collatéraux d’un abandon progressif de l’entretien : stagnation des eaux, développement d’algues, prolifération d’insectes, fuites dans les berges, déclin du cadre naturel et chute de fréquentation touristique. Une telle évolution remettrait en cause l’équilibre économique de nombreuses communes riveraines.

Le canal de Bourgogne, ouvrage emblématique du patrimoine fluvial français, s’étend sur 242 kilomètres, reliant Migennes à Saint-Jean-de-Losne. Construit au début du XIXe siècle, il joue aujourd’hui un rôle majeur dans le tourisme fluvial régional. Son attrait repose autant sur son architecture hydraulique que sur les paysages traversés, et sa fréquentation alimente une économie de proximité largement dépendante de sa vitalité.

Voies Navigables de France a précisé qu’aucune fermeture officielle n’est envisagée à court terme, et que la navigation devrait être maintenue sur l’ensemble du canal au-delà du 1er janvier 2026. Toutefois, l’établissement public n’écarte pas un ajustement de ses priorités en fonction de la participation financière des collectivités. Le maintien de l’offre de service pourrait ainsi évoluer selon le trafic enregistré et les discussions en cours avec les acteurs locaux.

Parmi les hypothèses évoquées, une gestion orientée vers les enjeux hydrauliques est envisagée. Ce scénario répondrait aux contraintes croissantes imposées par le changement climatique, notamment la gestion fine des ressources en eau. Le canal jouerait alors un rôle prioritaire d’ouvrage de régulation, au détriment de sa vocation touristique et patrimoniale.

Cette redéfinition potentielle du rôle du canal intervient dans un contexte plus large de rationalisation des infrastructures fluviales. Face à des budgets limités, VNF doit arbitrer entre entretien, sécurisation, adaptation climatique et valorisation touristique. Les canaux les moins fréquentés sont désormais scrutés avec attention, et certains pourraient être amenés à évoluer vers une gestion passive ou partielle.

Le cas du tronçon Venarey–Pouilly illustre ces tensions. Faiblement emprunté par la navigation de plaisance, il demande pourtant un entretien coûteux. Pour VNF, l’absence de rentabilité directe justifie la nécessité d’un appui territorial renforcé. Pour les collectivités, l’abandon du trafic marquerait une rupture avec la vocation historique

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