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Paquebot Princess Danae : les dessous du rêve

Le magazine Actunautique s’est penché sur l’histoire du Princess Danae, l’un des deux paquebots de croisière bloqués depuis quelques jours dans le port de Marseille pour cause d’impayés.

 

Le moins que l'on puisse dire est que les dernières semaines du navire n'ont pas été simples. Avant de faire l'objet d'une saisie conservatoire dans la cité phocéenne, le Princess Danae avait déjà été bloqué à Lisbonne, le 6 septembre dernier du fait d'un litige avec un créancier. Une situation qui a sans doute poussé son commandant à supprimer deux escales, Cadix et Barcelone, pour filer directement vers la France, craignant sans doute de nouvelles complications. Une démarche qui aura finalement été vaine, le bras de la justice ayant été plus long que les miles nautiques parcourus !

 

Mais revenons à la source de ce qui pourrait n’être qu’une belle et - trop ? - longue histoire... 

 

Port-Melbourne.JPG

 

C'est en 1955 que le futur Princess Danae est construit, ce qui ne nous rajeunit pas, par les chantiers irlandais Harlan & Wolff, là même ou fut construit le Titanic, pour la compagnie Port Line Ltd, une filiale de la Cunard. Le navire, qui se nomme alors Port Melbourne et dont le sister ship est le Port Sydney, est un cargo mixte de 160 mètres de long, destiné au transport de fret frigorifique et de passagers entre la Grande-Bretagne, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

 

A cette époque, 12 passagers choyés peuvent prendre part au voyage dont l'objectif principal est toutefois d'assurer la "Meet Run", l'approvisionnement de la Grande-Bretagne en viandes australiennes et néo-zélandaises.

 

En 1971, il y a 41 ans, le développement du transport en containers, l'apparition de navires plus grands et l'essor du transport aérien de passagers mettent un terme à la carrière du Port Melbourne vendu à l'armateur grec JC Karras, qui souhaite transformer le bateau (et son sister ship) en... ferries.

 

Rebaptisé Therisos Express, le Port Melbourne est finalement transformé en paquebot, son nouveau propriétaire souhaitant développer une activité de croisière sur le lucratif marché américain. Du port Melbourne, seul les moteurs et la coque seront conservés, le travail de reconstruction réalisé ayant été selon les spécialistes, remarquablement fait.

 

Princess-Danae

 

En 1976, le chantier est terminé et c'est sous le nom de Danae que le Therisos Express rentre en service. Dans les années 70, le navire est utilisé en charter par la compagnie Costa qui l'achète en 1985 pour compléter sa flotte. Dans le milieu des années 2000, le Princess Danae change une nouvelle fois de mains. Il est racheté par la compagnie portugaise Classic International Cruises, qui rachètera d'ailleurs son sister ship, alors dénommé Ocean Monarch, en 2007 !

 

Rénové en 2006, le Princess Danae se consacre alors à des croisières souvent opérées pour des magazines en mal de diversification des revenus, destinées à des publics avertis - croisières culturelles, destinations originales... - que l'aspect archaïque du navire ne rebute pas et qui au contraire, les séduit !

 

Des croisières au cours desquelles  l’aristocratie du navire - les clients - se nourrit le corps et l’esprit en refaisant le monde, pendant que le petit peuple des petits ponts (240 membres d’équipage) se fait le plus discret possible, pour ne pas gâcher le plaisir des vacanciers. 

 

Le 11 janvier 2012,  le bateau est affrété par NDS Voyages pour un tour du monde en 127 jours, composé de 7 croisières au choix des passagers.  Ce jour-là, il quitte Marseille avec 500 passagers et... 170 membres d’équipage. Un bateau de 57 ans, à bout de souffle, au sujet duquel quelques critiques ont bien filtré, mais bizarrement, aucune de la part de la presse présente à bord…

 

Dernièrement, c'est la société belge All Ways qui affrète le navire pour une croisière "inoubliable" selon la rétorique chère aux croisiéristes ! Une croisière qui semble t-il s'est définitivement terminée à Marseille, après divers blocages pour impayés survenus à Dublin puis Lisbonne... Le Princess Danae a maintenant terminé son voyage, les croisiéristes sont rentrés chez eux, mais pour les membres d’équipage, c’est une autre affaire qui commence.

 

Une histoire simple, banale, qui est un pur exemple des contradictions de notre société, entre une exigence toujours plus grande (et pas forcément infondée) quant à la qualité des prestations, au respect des normes etc., et la destinée laborieuse et précaire d’équipages soumis à des aléas financiers qui les dépassent.

 

S’il est désagréable pour des passagers de voir certaines prestations annulées (escales par exemple) pour cause de désastre financier, que dire des conséquences pour les centaines de membres d’équipages bloqués à Marseille… ? 

 

Et pour leurs familles ?

 

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