15 Avril 2015
En redressement judiciaire depuis le 2 avril, le constructeur français de bateaux pneumatiques dispose d'une période d'observation de 6 mois.
L'article publié en exclusivité dans nos colonnes vendredi soir, relatif au placement en redressement judiciaire de Zodiac Nautic, mythique constructeur français de bateaux pneumatiques, a déclenché un flot ininterrompu de commentaires de désolation et d'inquiétude auprès de notre rédaction, ainsi que dans les réseaux sociaux, démontrant s'il le fallait, toute la force de cette marque dans l'inconscient collectif des plaisanciers.
La cause majeure de cette faillite industrielle vient clairement d'un manque de liquidités : le plan social conduit ces derniers mois en France, sans doute surdimensionné, qui a mené à la fermeture d'une usine (au profit du site tunisien du groupe construit en 2009 et qui emploie 150 salariés), et à la suppression de 70 emplois sur les 190 que comptait l'activité hexagonale, a tout simplement syphonné la trésorerie de l'entreprise qui, dès lors, ne pouvait plus commander de matière première et donc honorer ses commandes, dans un contexte ou les fournisseurs exigeaient déjà des délais de paiements très courts, eu égard à la situation fragile de l'entreprise.
Cette crise de liquidité est apparue au pire moment pour l'entreprise : celle ou elle produit et livre le réseau, puisque l'essentiel de son chiffre d'affaires se réalise entre les mois de février et juin.
Des mois qui voient les besoins de trésorerie de l'entreprise fortement augmenter, tout comme d'ailleurs le flux de ses rentrées financières...
Cette crise de "développement", l'actionnaire de Zodiac Nautic, le fonds OpenGate Capital, aurait sans doute pu y remédier, en abondant le BfR de l'entreprise (besoin en fond de roulement), temporairement d'ailleurs, avant de récupérer sa mise en fin de saison.
Ce choix financier, il semble qu'OpenGate n'ait pas décidé de le faire, préférant ne plus remettre au pot.
Aujourd'hui, la société Zodiac Nautic se retrouve donc face à elle même pour rebondir et redémarrer.
Ou disparaître...
En redressement judiciaire, l'entreprise dispose en effet de 6 mois pour trouver un repreneur ou être liquidée, une situation à laquelle on n'ose même pas imaginer !
Si cette période de 6 mois peut sembler idéale, laissant le délai maximum à l'entreprise pour séduire un acquéreur, dans les faits et de l'avis de toute la profession, ce délai est bien trop long, 3 mois ayant bien suffi pour ce faire.
Car donner 6 mois à Zodiac Nautic, c'est permettre de repousser une éventuelle reprise à une date... ultérieure à celle du démarrage de la saison nautique 2015-2016, et donc l'hypothéquer, car un repreneur ne pourra dès lors jamais être prêt pour aborder la nouvelle année, en prenant le train en marche...
Si une reprise de Zodiac Nautic doit se faire, la première condition du succès de cette démarche est donc clairement sa rapidité : d'ici 3 mois, il sera sans doute trop tard pour sauver l'entreprise, ce d'autant plus que son encadrement a largement été saigné par les démissions et départs en tous genres, et qu'il faudra compter avec cette faiblesse.
Cette situation difficile ne doit toutefois pas occulter les points forts dont dispose Zodiac Nautic : une position de leader mondial du marché des bateaux pneumatiques, une marque mythique connue sur l'ensemble des mers du globe, une structure industrielle européenne restructurée autour du site tunisien, un beau réseau de distribution tant en France qu'à l'international, une gamme de produits de qualité, cohérente et adressant bien le marché, dont les dernières nouveautés se sont bien vendues depuis le dernier Nautic de Paris. A cet égard, l'entreprise serait sans doute parvenue cette année à atteindre son plan de 42 millions d'euros de chiffre d'affaires, si elle n'avait pas été rattrappée par cette crise de liquidités !
Dans ce contexte, qui pourrait donc s'intéresser aujourd'hui à reprendre Zodiac Nautic ?
L'exemple désastreux d'OpenGate ne plaidant pas pour un fonds d'investissement spécialiste en "retournement" d'entreprises en dfficulté, l'avenir ne semble pouvoir s'écrire pour Zodiac qu'au travers d'un groupe industriel, qu'il soit dans le nautisme, mais les candidats y seront sans doute rares, ou dans l'industrie, au travers d'une grosse PME industrielle diversifiée, souhaitant optimiser ses fonctions centrales et accroître son périmètre de métier et se renforcer éventuellement d'une activité de contre-cycle.
Dans le nautisme, le salut pourrait venir de Chine, les exemples de Sunseeker, Ferretti et Rodman plaidant pour, de même pourquoi pas de l'américain Brunswick, qui pourrait à bon compte renforcer ses marques Valiant et Black Fin, se positionner comme le leader mondial du secteur et "gagner des tableaux" pour y poser ses moteurs Mercury, au détriment de ses concurrents de toujours, Yamaha et Suzuki...
Vers quel avenir se dirige Zodiac Nautic ?
Les semaines qui viennent le diront, mais un vrai espoir subsiste pour le constructeur français. Sachant que le temps qui passe est finalement le principal élément qui pourrait grever la réussite d'une reprise que l'on ne peut souhaiter... qu'industrielle, et conditionnée à une vraie injection de capitaux !