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Le TOP 10 des pays subventionnant le plus le pillage des eaux du globe

Qui sont les pays qui contribuent le plus à piller et détruire la ressource hallieutique de la planète, par une politique de subventions démesurée de leurs flottes de pêche ? Une nouvelle étude soutenue par Oceana cartographie les subventions préjudiciables que versent les pays riches à leurs flottes de pêche lointaine, même lorsqu’elles opèrent dans les eaux des pays les moins avancés

Le TOP 10 des pays subventionnant le plus le pillage des eaux du globe

Publié aujourd’hui par Oceana, un nouveau rapport démontre que les principaux pays pratiquant une pêche industrielle dans le monde utilisent des programmes de subventions à la pêche qui déplacent le risque de surpêche vers les eaux d’autres pays.

Les subventions préjudiciables octroyées par les pays riches au secteur de la pêche représentent des milliards de dollars. Pour la première fois, on a pu remonter leur piste dans le monde entier, y compris dans les pays les moins avancés (PMA) ou en haute mer. Au sens large, les subventions préjudiciables sont des paiements qui permettent aux navires de pêche de s’aventurer plus loin, de rester plus longtemps en mer ou d’avoir une capacité supérieure à celle qu’ils auraient autrement.

Le TOP 10 des pays pilleurs de mers

La Chine, le Japon, la Corée, la Russie, les États-Unis, la Thaïlande, Taïwan, l’Espagne, l’Indonésie et la Norvège sont les 10 plus grands pourvoyeurs de subventions préjudiciables au secteur de la pêche dans le monde, pour un montant total de 15,4 milliards de dollars (les dernières données disponibles datant de 2018). L’Union européenne, prise dans son ensemble, octroie 2,0 milliards de dollars de subventions préjudiciables, ce qui pourrait la placer en troisième position, juste derrière la Chine (5,9 milliards de dollars) et le Japon (2,1 milliards de dollars).

Le « top 10 » a dépensé 5,4 milliards de dollars de subventions préjudiciables en soutien à la pêche dans les eaux de 116 autres pays, et 800 millions de dollars supplémentaires pour la pêche en haute mer. En ce qui concerne la pêche dans les eaux lointaines d’autres pays, la Chine est là encore le premier pourvoyeur de subventions préjudiciables avec 2,9 milliards de dollars, tandis que la plus grande empreinte de subventions préjudiciables cumulées s’observe dans les eaux japonaises, où l’on estime que 1,4 milliard de dollars ont été dépensés par les flottes de pêche lointaine d’autres pays. 

Dans les eaux de plusieurs pays les moins avancés, les captures réalisées et les subventions reçues par les flottes étrangères d’après nos estimations surpassent celles des flottes nationales. Les flottes de pêche lointaine reçoivent souvent des subventions représentant entre 20 et 40 % de la valeur des captures ; il est par conséquent hautement probable que les flottes de pêche lointaine ne seraient pas rentables sans les subventions à la pêche et sans l’accès illimité aux eaux d’autres nations, dont celles des PMA. Un exemple extrême est celui de la Guinée-Bissau, où les subventions reçues par les pêcheurs étrangers opérant dans ses eaux dépassent les subventions nationales selon un rapport de 1 173 pour 1.

Selon Rashid Sumaila, coauteur du rapport et membre du conseil d’Oceana, «le décalage entre le coût et les avantages des subventions à la pêche a de réelles implications morales et éthiques. En moyenne, le montant des subventions accordées par les nations étrangères pour permettre à leurs navires de pêche lointaine d’opérer en Afrique est deux fois plus élevé que ce que l’Afrique octroie à ses propres pêcheries. Or dans certains pays d’Afrique occidentale, le poisson représente jusqu’à 60 % de l’apport en protéines. »  En soutenant leurs propres flottes, les principaux pays qui financent la pêche lointaine pourraient par conséquent transférer les risques de surpêche vers les eaux de pays qui sont les moins capables d’en assumer les conséquences.

Cette étude paraît à un moment crucial. L’Organisation mondiale du commerce (OMC) doit accueillir les dirigeants mondiaux à l’occasion d’une réunion ministérielle qui se tiendra le 15 juillet et qui abordera l’adoption de règles pour la réduction des subventions favorisant la surcapacité, la surpêche et la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). « La santé et les moyens de subsistance de centaines de millions de personnes vivant dans les communautés côtières dépendent de la pêche, pourtant ces mêmes ressources sont exploitées par des navires industriels étrangers fortement subventionnés. Après 20 ans de retard, nous n’avons plus de temps ni de poissons à perdre : nous devons arrêter de subventionner la surpêche dès à présent. L’OMC aurait dû adopter depuis très longtemps des règles strictes visant à l’élimination des subventions préjudiciables ; c’est en effet la plus grande mesure mondiale qui, à elle seule, est susceptible de nous assurer un océan abondant à l’avenir », déclare Andy Sharpless, directeur général d’Oceana.

Alors que les responsables politiques, les ministres et les délégués s’apprêtent à participer à la réunion ministérielle prévue par l’OMC le 15 juillet, Oceana demande à l’OMC :

  • d’interdire les subventions préjudiciables octroyées à toute opération de pêche et à toute activité de soutien réalisées en dehors de la juridiction des États membres,
  • de demander aux principaux pourvoyeurs de subventions d’assumer la plus grande part de responsabilité dans l’élimination des subventions préjudiciables et dans leur affectation là où elles seront bénéfiques,
  • de développer un cadre limitant les subventions préjudiciables octroyées au secteur de la pêche ; celui-ci devra être transparent, basé sur les performances, et assorti d’échéances et de normes claires de déclaration des données entre États membres.

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