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Brest - le Skravik, un voilier au service d’une pêche durable, trace sa voie,

Premier voilier de pêche professionnelle homologué en France, le Skravik a entamé sa saison en mer après un parcours administratif semé d’embûches. Ce catamaran recyclé, porté par une coopérative d’intérêt collectif, incarne un projet novateur qui associe pêche artisanale, respect de l’environnement et ambition sociale.

Brest - le Skravik, un voilier au service d’une pêche durable, trace sa voie,

Depuis le printemps 2025, le Skravik sillonne la rade de Brest. Ce voilier, qui fut autrefois un bateau de plaisance, a été transformé pour répondre aux besoins d’une pêche plus respectueuse des ressources marines. À son bord, Tangi Le Bot et Fram, les deux marins engagés dans cette aventure, testent diverses méthodes pour capturer maquereaux et autres espèces, sans dépendre du gasoil.

Pour Tangi Le Bot, cette démarche s’inscrit dans une réflexion entamée dès son enfance. Lui qui a découvert la navigation sur une petite annexe baptisée du nom d’un oiseau marin rêvait de mener un jour un bateau à voile à vocation plus grande. Ce rêve a pris forme après ses études de biologie marine et ses premières navigations dans le cadre de missions scientifiques. L’idée a alors germé : conjuguer pêche et propulsion éolienne pour limiter les coûts et l’impact environnemental.

Avant de prendre la mer, le Skravik a dû franchir une série d’obstacles réglementaires. Les textes encadrant la pêche professionnelle sont en effet rédigés pour des navires à moteur thermique, ce qui a nécessité de longues négociations avec les Affaires Maritimes et le Comité des Pêches du Finistère. Pendant trois années, la coopérative a multiplié les démarches pour obtenir une dérogation, adaptée à ce prototype atypique.

La structure porteuse du projet, une coopérative d’intérêt collectif, rassemble aujourd’hui 115 sociétaires. Ces acteurs, issus d’horizons divers, se réunissent régulièrement afin de définir les orientations futures de l’initiative. Parmi les ambitions évoquées figure celle de reproduire le modèle Skravik sur l’ensemble des façades maritimes françaises. Certains imaginent déjà des voiliers de pêche alimentant les cantines scolaires en produits locaux et durables.

Les premières marées ont permis à l’équipage de mettre à l’épreuve le concept. La pêche se vend directement depuis le catamaran, amarré dans le petit port du Tinduff. Ce circuit court, jugé essentiel par les fondateurs, garantit une meilleure valorisation des captures. « Nous n’avons pas besoin de pêcher en grande quantité. L’essentiel est de pouvoir proposer un produit à un prix fixe, qui permette de trouver l’équilibre », souligne Tangi Le Bot.

Le Skravik, dont le nom signifie « sterne » en breton, porte la symbolique d’un oiseau marin agile, choisi pour incarner la philosophie du projet. Dans le sillage de ce premier navire, un second catamaran baptisé Morskoul – le fou de bassan – a rejoint la flotte de la coopérative. Ce bateau, légèrement plus grand, servira cet été à une mission d’observation des cétacés en collaboration avec l’université de La Rochelle.

La démarche dépasse le cadre strict de la pêche. Le Skravik entend également contribuer à la sensibilisation aux enjeux marins. Des formations sont proposées par la coopérative et des collaborations scientifiques se développent. Ce volet pédagogique vise à ancrer le projet dans une dynamique plus large de protection des milieux marins et de développement local.

Enfin, derrière l’image de ce catamaran porté par les vents se dessine une volonté de repenser en profondeur le modèle économique de la pêche artisanale. « Sans carburant à payer ni à consommer, on peut envisager une activité plus sélective, plus durable », résume Tangi Le Bot. Pour ce marin et son équipage, il s’agit avant tout d’ouvrir une voie nouvelle, qui pourrait bien inspirer d’autres ports français.

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