9 Février 2021
Entre 9 et 12 millions de tonnes de plastique sont déversées dans les océans chaque année ; selon l’ONU, si aucune mesure importante n’est prise, il y aura en 2050 plus de plastique que de poissons dans les océans.
Lassé de percuter des objets flottants au fil de ses courses – notamment lors de la Transat Jacques-Vabre, en 2015 – et de voir des lieux paradisiaques se transformer en décharges, l’aventurier et skipper aux multiples records Yvan Bourgnon imagine en 2016 le Manta, un multicoque géant capable de collecter de manière industrielle des déchets plastiques flottants.
Il crée l’association The SeaCleaners et met en place un pôle de compétences dédié à sa construction ; après 3 ans de recherche et développement, ce navire à la pointe de la technologie a été dévoilé fin janvier.
Le Manta pourra ramasser aussi bien les macrodéchets flottants que les débris plus petits, à partir de 10 millimètres, et jusqu’à un mètre de profondeur. Ce bateau de 56,5 mètres de long pour 26 de large devrait embarquer un équipage de 34 personnes.
Ce catamaran sera le seul bateau de travail capable de gérer 100 % du plastique collecté en mer, grâce à son usine embarquée. Les déchets plastiques seront triés manuellement, traités et valorisés avec une unité de conversion énergétique par pyrolyse qui transformera l’intégralité du plastique collecté en énergie.
Avec une capacité de collecte et de traitement des déchets de 1 à 3 tonnes par heure, l’association The SeaCleaners ambitionne de débarrasser les océans de 5000 à 10 000 tonnes de déchets plastiques par an.
Le Manta sera doté de quatre moyens de collecte complémentaires : des tapis roulants inclinés situés sous la plate-forme, entre les coques, 2 bateaux de dépollution (Mobula 8 et Mobula 10), qui interviendront dans les zones les moins accessibles au catamaran, trois filets à l’arrière qui collecteront les déchets de surface et deux grues, pour extraire les plus gros débris.
Au niveau de la propulsion, le Manta fonctionnera avec un système hybride combinant 1500 m² de voiles installées sur des gréements automatisés et des moteurs électriques.
L'électricité sera produite à bord par une série d’équipements de production d’énergies renouvelables (2 éoliennes, des hydro-générateurs, près de 500 m² de panneaux solaires photovoltaïques) et par l’unité de valorisation énergétique des déchets.
Ce système unique et novateur devrait lui permettre de fonctionner en moyenne 75 % du temps de manière autonome, sans utiliser d'énergie fossile, avec une empreinte environnementale réduite au strict minimum.
Au-delà de sa fonction de nettoyeur des mers, le Manta fera aussi de la prévention, en contribuant à la transition vers une économie circulaire dans les pays impactés, en collaboration avec les décideurs locaux, en menant des opérations de sensibilisation à la pollution plastique et en accueillant des mission scientifiques internationales.
Le Manta naviguera principalement en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud, des secteurs où la pollution plastique marine est particulièrement dense : zones côtières, rivières, embouchures des grands fleuves et estuaires. Navire hauturier, le Manta pourra aussi intervenir dans les zones polluées à la suite d’une catastrophe naturelle ou climatique (cyclones, tsunamis...).
Il devrait opérer 300 jours par an, 7 jours sur 7, 20h sur 24, : 10 heures avec les tapis de collecte en journée, 10 heures avec les systèmes de collecte de surface la nuit dans les zones côtières.
Un consortium composé d’une vingtaine d’entreprises et de cinq laboratoires de recherche est déjà à pied d’œuvre pour la conception et le développement du bateau.
La sélection du chantier naval qui assurera la construction aura lieu cette année, avec une mise à l’eau et une première campagne de collecte prévue en 2024.