Le 1er février, l'ïle des Faisans, à Hendaye, est redevenue espagnole pour... 6 mois

Nichée sur la rivière Bidassoa, entre Hendaye et Irun, l’Île des Faisans est un territoire singulier dont l’histoire et le statut en font un cas unique au monde.

Modeste îlot d’à peine deux mille mètres carrés, elle est pourtant au cœur d’un arrangement diplomatique remarquable : depuis le traité des Pyrénées signé en 1659, sa souveraineté est partagée entre la France et l’Espagne, chacun des deux pays en assurant l’administration pour une période alternée de six mois. Ce modèle de gouvernance, d’une stabilité exemplaire, fait de l’Île des Faisans le plus ancien condominium encore en vigueur.

Surnommée l’Île de la Conférence, elle fut le théâtre de négociations majeures entre les couronnes française et espagnole. C’est en ces lieux que fut scellée la paix entre les deux royaumes, mettant fin à des décennies de conflits. Le traité des Pyrénées, signé ici-même en 1659, consacra cette réconciliation et ouvrit la voie au mariage du jeune roi Louis XIV avec Marie-Thérèse d’Autriche, fille du roi Philippe IV d’Espagne. Bien avant cet événement, l’île avait déjà servi de cadre à des échanges de princesses destinées à unir les grandes dynasties européennes, comme en 1615 lorsque les futures reines Élisabeth de France et Anne d’Autriche y furent échangées.

Depuis plus de trois siècles et demi, la souveraineté de ce minuscule territoire alterne avec une régularité immuable.

Chaque premier février et premier août, un passage de relais discret mais solennel a lieu entre la municipalité d’Irun, qui représente l’Espagne, et celle d’Hendaye, qui agit pour le compte de la France.

Toutefois, cette administration tournante demeure avant tout symbolique, car l’île est inhabitée et interdite au public. Seuls quelques représentants des deux nations y pénètrent à l’occasion de cérémonies officielles, perpétuant ainsi une tradition diplomatique séculaire.

Aujourd’hui, l’Île des Faisans n’offre aux regards que quelques arbres et une stèle commémorative rappelant la signature du traité qui scella la paix entre deux grandes puissances européennes. Son silence n’a d’égal que la force du message qu’elle incarne : celui d’une entente durable, d’un respect mutuel et d’un équilibre diplomatique préservé à travers les âges.