27 Novembre 2014
Euronaval 2014 était l'occasion pour DCNS de présenter un tout nouveau modèle de sous-marin transocéanique conventionnel, le SMX Ocean.
ActuNautique a rencontré Xavier Mesnet, Directeur marketing opérationnel de la Division sous-marins de DCNS, qui présente ce modèle très étonnant aux lecteurs d'ActuNautique.com.
Pourquoi le chantier DCNS a-t-il décidé de présenter le SMX Ocean ? Ce sous-marin répond-il à un besoin exprimé par une marine en particulier ?
Xavier Mesnet - Tous les deux ans, traditionnellement, à l'occasion du salon Euronaval, DCNS présente un modèle de sous-marin spécifique, à chaque fois élaboré selon une thématique particulière. Cette année, ce thème était la transposition d'un design de Barracuda nucléaire sur un modèle diesel. Les marines sont aujourd'hui à la recherche de sous-marins disposant de plus d'autonomie et offrant de plus grosses capacités que les sous-marins conventionnels classiques. Avec le SMX Ocean, nous nous positionnons sur le marché des très gros sous-marins, à très grande autonomie.
Le SMX Ocean est effectivement le plus gros sous-marin conventionnel européen !
Xavier Mesnet - Le SMX Ocean fait 4700 tonnes pour près de 100m de long et il se positionne de fait comme le plus gros modèle disponible actuellement en Europe dans le domaine des sous-marins conventonnels.
Quel est le marché qui s'offre à ce modèle, je pense notamment à l'Australie et à la Pologne ?
Xavier Mesnet - Notre objectif avec le SMX Ocean était de nous positionner sur le créneau des gros sous-marins conventionnels, pour lancer un signal fort aux marines cherchant un modèle océanique. Aujourd'hui, DCNS a prouvé qu'il savait construire de très gros modèles, notamment des SNLE de 15000 tonnes. Cette expérience nous permet de proposer un design éprouvé sur les SNA, parfaitement adapté à un modèle conventionnel. Il va sans dire que ce type de modèle intéresse des marines confrontées à de grandes zones de transit, donc des marines oeuvrant sur l'ensemble des mers du globe.
Quels sont les avantages du SMX Ocean au niveau des transit justement ?
Xavier Mesnet - Le SMX Ocean dispose d'un très grande autonomie et peut réaliser des transits longs, passer de l'Atlantique à l'Océan Indien, de l'Océan Indien au Pacifique ! Son autonomie est de 90 jours, soit deux fois celle d'un Scorpène à une vitesse de transit de 14 noeuds (10 noeuds pour un Scorpène).
Pour en revenir à ma question, il intéresse donc moins la Pologne que l'Australie peut-être...
Xavier Mesnet - Disons que ce sont les clients qui vont nous indiquer ce qu'ils souhitent plus précisément. Notre but était avant tout de nous positionner vis à vis des marines ayant des sous-marins opérant sur plusieurs mers.
Parmi les innovations apportées par le SMX Ocean, vous adoptez une pile à combustible, une première pour vous sur un sous-marin conventionnel, un peu à la manière des U212 et 214 allemands. Jusqu'à présent, le système anaérobie DCNS consistait dans un système Mesma. Pourquoi la pile à combustible ?
Xavier Mesnet - Le problème d'un sous-marin diesel est qu'il a besoin de sources d'énergie. Ce qui est nouveau sur Euronaval cette année chez nous, c'est que nous proposons 3 alternatives différentes sur le SMX Ocean.
Certaines marines veulent pouvoir disposer de grandes vitesses tactiques sous l'eau, en particulier pour pouvoir repositionner leurs sous-marins rapidement. Pour ces marines, nous proposons donc une tranche additionnelle composée de batteries lithium-ion qui donnent cette capacité très spécifique. Naviguer immergé par exemple 24h00 à 10 noeuds, sachant que l'on peut aussi rester sous l'eau 1 semaine à 4 noeuds.
La seconde technologie que nous proposons est notre système Mesma à cycle fermé, basé sur des turbines et pompes, simple d'entretien, déjà vendu au Pakistan, qui permet lui de disposer de 2 semaines d'autonomie à 4 noeuds.
Enfin, nous proposons désormais une troisième technologie, la pile à combustible de seconde génération, qui ne stocke plus l'hydrogène à bord contrairement à la première génération, ce qui est plus sûr, et qui utilise un reformer pour extraire l'hydrogène du gazole, et alimenter la pile à combustible à la demande. Cette technologie permet de rester sous l'eau pendant près de 3 semaines, à la vitesse de 4 noeuds.
Le SMX Ocean est donc déclinable avec 3 technologies anaérobie différentes ?
Xavier Mesnet - Effectivement, chaque marine pourra ainsi configurer son SMX Ocean en fonction de ses besoins propres.
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Le fait que le SMX Ocean ait été développé à partir du design d'un Barracuda vous permet d'éviter de lourdes phases d'industrialisation. Concrètement, quel est l'avantage en gain de temps pour une marine ? A partir de la signature de la commande, combien de temps vous faudrait-il pour lancer la construction ?
Xavier Mesnet - Ce que l'on dit aujourd'hui c'est que le SMX Ocean est un sous-marin réalisable, car il utilise un design qui a été réalisé jusqu'au bout ! Toutes ses phases de design, conduites avec nos différents sous-traitants, ont déjà été réalisées et ne seront plus à faire ! Après, une fois que les contrats sont passés, nous pouvons livrer les sous-marins entre 5 et 7 ans, selon les clients et la taille des modèles.
Ce gain de temps se compte t-il en mois, en années ?
Xavier Mesnet - C'est difficile de répondre à cette question avec un chiffre précis ! Ce qui est sûr en revanche, c'est que cela nous permet d'être très sûrs de nous, dans la faisabilité du sous-marin et sa réalisation finale, car plus on avance dans un projet, plus on est sûr de sa faisablité, car plus on enlève des marches que l'on avait prévues au début. Ces marches, on les connaît déjà sur le SMX Ocean, et cela nous permet de mieux appréhender le projet, dès son début ! Le SMX Ocean reprend du Barracuda toute sa partie avant, tout son système de combat, toute sa partie des mâts périscopiques, toute sa partie des équipements opérations spéciales, et toute sa partie habitabilité avec plus de place pour le personnel que sur les SNA ! Tout cela, on n'a pas à le refaire, c'est déjà fait !
On reproche beaucoup aux navires de guerre français d'être tous des prototypes utilisant des pièces toutes uniques d'un bâtiment à l'autre, ce même dans le cas de séries de navires, d'ou des difficultés d'entretien en service après-vente. Souvent, en cas de pépin, il faut quasiment refabriquer les pièces, d'ou de forts coûts et des délais allongés. Le SMX Ocean bénéficiera t-il d'un début de standardisation des pièces ?
Xavier Mesnet - C'est déjà le cas sur les Barracuda, puisque sur les Barracuda et les Scorpène, on reprend le maximum de technologies éprouvées, ce qui nous permet d'augmenter la fiabilité générale. Maintenant, quand on fabrique des unités comme les Barracuda, les prédécesseurs ayant été conçus 35 ans avant, forcément un certain nombre de technologies ont évolué entretemps. Dans tous les cas de figure, il est dans notre intérêt et dans celui de nos clients de faire le maximum de re-use.