5 Juin 2025
La troisième Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC3) s’ouvrira à Nice du 9 au 13 juin 2025. Placée sous l’égide conjointe de la France et du Costa Rica, elle s’inscrit dans une série d’événements majeurs destinés à faire progresser l’Objectif de développement durable n°14 de l’Agenda 2030, centré sur la protection de l’environnement marin. À mi-parcours des engagements pris en 2015, cette conférence entend dresser un état des lieux lucide, structurer les mécanismes de suivi et proposer des mesures concrètes pour inverser les tendances actuelles.
À ce titre, l’UNOC3 ambitionne d’aligner les approches locales, nationales, régionales et internationales dans un cadre de gouvernance plus cohérent. L’enjeu est de favoriser des décisions coordonnées et d’assurer une meilleure articulation entre la science, les politiques publiques, les capacités financières et les réalités du terrain.
Une alerte partagée sur la dégradation de l’océan
Malgré les nombreux engagements pris lors des précédentes conférences (New York en 2017, Lisbonne en 2022), les indicateurs de santé des océans restent préoccupants. La surexploitation des ressources halieutiques, la pollution plastique, l’acidification liée aux émissions de CO₂ et la dégradation des écosystèmes côtiers pèsent lourdement sur la résilience des milieux marins. Les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) confirment l’urgence d’une action collective.
La conférence de Nice vise ainsi à mobiliser des ressources concrètes, à encourager les États à tenir leurs engagements et à intégrer davantage les connaissances scientifiques dans les décisions politiques. Il s’agit également de renforcer les dispositifs de suivi, d’alerte et d’évaluation des engagements pris dans le cadre des conférences précédentes.
Une gouvernance fragmentée à surmonter
L’une des limites principales des initiatives actuelles tient à la dispersion des efforts et à l’insuffisante coordination entre les nombreux acteurs impliqués dans la gestion des mers. Plus de 30 agences onusiennes et institutions intergouvernementales interviennent sur les sujets liés à l’océan, souvent sans véritable cohérence stratégique. Ce morcellement complique la mise en œuvre de politiques efficaces et l’utilisation optimale des ressources.
Face à ce constat, l’UNOC3 cherche à promouvoir une architecture plus intégrée, capable de rassembler institutions internationales, États, collectivités territoriales, monde académique et secteur privé autour d’un socle commun de principes et d’actions. La création d’un cadre mondial de suivi des engagements – un "tableau de bord de l’océan" – est à l’étude.
Cinq priorités d’action pour 2025
Le document de préparation à la conférence définit cinq axes majeurs pour structurer les débats :
Gouvernance internationale : établir une coopération renforcée entre les institutions multilatérales, améliorer les mécanismes d’évaluation et de coordination, et assurer la cohérence des mandats.
Science et données : renforcer les capacités scientifiques, faciliter l’accès aux données marines, encourager l’innovation et soutenir les programmes de recherche interdisciplinaires.
Financements durables : mobiliser des fonds publics et privés, développer des instruments financiers adaptés, comme les obligations bleues ou les crédits carbone marins.
Résilience des écosystèmes : protéger les habitats marins, restaurer les écosystèmes dégradés, et intégrer la dimension climatique dans toutes les politiques maritimes.
Inclusion sociale : associer les communautés locales, les peuples autochtones, les femmes et les jeunes aux décisions et à la gouvernance des espaces maritimes.
Un rendez-vous décisif pour les acteurs de la mer
Plus de 10 000 participants sont attendus à Nice, dont des chefs d’État, ministres, représentants d’organisations internationales, scientifiques, entreprises, ONG et journalistes. Des dizaines d’événements parallèles viendront compléter les sessions plénières, permettant aux différentes parties prenantes de présenter leurs projets, partager leurs expertises et proposer des solutions concrètes.
La conférence donnera également lieu à un segment politique de haut niveau, prévu le 11 juin, où les dirigeants mondiaux prendront des engagements formels et signeront des accords de coopération. La question des aires marines protégées, de la lutte contre la pêche illégale, et de la régulation du transport maritime figurent parmi les sujets centraux de ces discussions.
L’articulation entre le local et le global comme levier d’action
L’un des objectifs majeurs de l’UNOC3 est de favoriser une meilleure prise en compte des dynamiques locales dans les stratégies internationales. De nombreuses collectivités littorales, notamment des territoires insulaires et ultra-marins, expérimentent des dispositifs innovants de gestion durable des ressources. La conférence souhaite leur offrir une tribune pour mettre en valeur ces initiatives et encourager leur reproduction à plus grande échelle.
Par ailleurs, le rôle des jeunes, des chercheurs et de la société civile est mis en avant. Des forums citoyens, des ateliers participatifs et des expositions sont prévus tout au long de la semaine, avec une attention particulière portée à l’inclusion des publics éloignés des processus décisionnels.
Un moment charnière à l’horizon 2030
À cinq ans de l’échéance des Objectifs de développement durable (ODD), la conférence de Nice représente une opportunité critique pour redonner un cap à la politique océanique mondiale. Si les ambitions sont fortes, leur concrétisation dépendra de la volonté des États à traduire les discours en actes, à renforcer leurs coopérations et à mobiliser les moyens nécessaires.