9 Mai 2018
Sur la route qui va de Concarneau à Saint-Barth, en ce début de printemps 2018, deux croisements auront eu les atours d’un carrefour des ambitions.
Et, par deux fois, le sens giratoire aura donné la priorité à celui qui venait de la droite. Comme il y a six jours, Agir Recouvrement a émergé de l’indécis pour prendre la tête de la flotte ce matin. C’était écrit, restait à le constater dans la réalité. Adrien Hardy et Thomas Ruyant, avec leur route occidentale il y a une petite semaine, avec leur route nord depuis, ont eu le talent de sentir où et quand couper le fromage. Le petit supplément de chance qui a jalonné leur route, c’est d’avoir trouvé un peu plus de pression qu’annoncé, qui leur a permis de tenir le choc face aux adeptes de la route la plus directe. Leur talent aura été de sentir les coups pour émerger en tête avec, au classement de 5 heures ce matin, 11 milles d’avance sur Bretagne CMB Performance.
« La dernière fois que nous avions croisé Bretagne CMB Performance, à La Palma, nous étions 10 milles derrière. On est content d’être 10 milles devant cette fois-ci, disait Adrien Hardy ce matin. Ça nous met dans une très bonne position. La bascule n’est pas très franche, et il va surtout falloir gérer les dernières nuits, avec de gros grains qui arrivent en toute fin de nuit ».
Ce constat du matin ne présume en rien de l’issue de la 14e Transat AG2R LA MONDIALE. Il reste 394 milles à parcourir aux leaders, mais ces 11 milles vont assurer aux tacticiens un petit tapis flottant depuis lequel ils vont pouvoir contrôler la concurrence… à condition que ni les sargasses, ni ces fameux grains qui génèrent des nuages gris foncé et des instabilités de vent très fortes ne viennent trop contrecarrer le plan de vol établi. Il y aura aussi, dans la route de Adrien Hardy, l’arrivée à Saint-Barth qui, il y a deux ans, avait piégé le tandem qu’il formait alors avec Vincent Biarnès. « Le contournement de l’île n’est pas très compliqué, c’est une petite île, surtout quand on a de l’avance sur les concurrents. Mais, il y a deux ans, les alizés s’étaient complètement effondrés alors que rien ne l’annonçait. Il faudra être très vigilant ».
Le croisement des deux leaders a aussi permis à Breizh Cola d’avoir une vue plus objective de sa propre situation et des coups à jouer dans la grosse journée et demie qu’il reste à manager. Toujours dans le sud, Gildas Mahé et Nicolas Troussel pointent à 27,9 miles de la tête au premier classement du matin et, pour le premier nommé, il reste un match à jouer : « Il reste exactement 420 milles pour arriver à Saint-Barthélemy, il va y avoir des oscillations de vent, des bascules et du courant, il faut être patient, ce n'est terminé. Il faut continuer à s'appliquer, à faire le boulot pour arriver le mieux placé possible à l'arrivée. Ce n'est pas fini tout ça. Agir Recouvrement a croisé devant Bretagne CMB Performance, ils ont l'air de réussir à descendre du Nord. On a fait une nuit directe en tribord amure donc la suite au prochain numéro. Les conditions météos sont agréables mais nous luttons en permanence avec les algues, donc on se met en pilote automatique pour pouvoir les enlever, quand l'autre dort. Nous avons de la chance parce qu'elles ne s'accrochent pas toujours sur le bateau, mais elles sont partout ».
Derrière ce trio de tête, Guyot Environnement exploite autant que faire se peut sa position intermédiaire, avec 35,3 milles de retard sur la tête, NF Habitat et Groupe Royer - Secours Populaire sont un tout petit peu plus loin, dans le sillage des leaders, et Armor Lux - Gedimat, 7e et disposant d’une confortable marge sur le 8e, Le Macaron French Pastries, semblait vouloir tenter un dernier coup en allant au nord pour soigner l’angle de sa dégringolade prochaine vers Saint-Barth.
A une journée et demie de l’arrivée, l’heure des derniers duels approche. Un duel à armes égales. Agir Recouvrement semble simplement avoir une balle de plus dans le barillet. C’est déjà beaucoup.