1 Octobre 2025
Chaque automne, le golfe de Saint-Tropez se transforme en véritable théâtre maritime où l’histoire de la voile, les prouesses technologiques et la passion des marins s’entremêlent. L’édition 2025 des Voiles de Saint-Tropez, 27ᵉ du nom, confirme une fois de plus son statut d’événement nautique incontournable. Ce mercredi, sous un ciel lumineux et une brise thermique parfaitement installée, Modernes et Traditions se sont élancés pour des manches hautes en intensité, offrant aux spectateurs des images d’une rare beauté.
Le spectacle des départs fait toujours vibrer le public, mais celui des arrivées mérite parfois encore plus le détour. Ce mercredi, les premiers Modernes -menés par Vesper et Nanoq Final Final- filaient vers la ligne sous code zéro tandis que les Traditions, partis de Saint-Raphaël, serraient le vent avec une élégance intemporelle. Dans ce ballet nautique, on reconnaissait notamment le majestueux Cambria et ses 50 mètres de mât en spruce, lancé à la poursuite d’Elena of London, leader de sa catégorie. Plus loin, Marilee, nouveau venu de type New York 40, s’invitait avec panache. En arrière-plan, la silhouette imposante de l’Atlantic, goélette de 65 mètres, offrait un tableau impressionnant en rattrapant les P Class.
Autre figure marquante : le Swan 44 Pride, véritable légende des régates tropéziennes. Impeccablement réglé, il a remporté sa troisième victoire consécutive dans sa classe. Ce voilier occupe une place symbolique particulière : c’est lui qui, en 1981, défia le 12 m JI Ikra et donna naissance à la Nioulargue, ancêtre direct des Voiles de Saint-Tropez.
Cette année, une nouvelle règle a attiré l’attention des équipages : les bateaux volant le départ se voient automatiquement rétrogradés de cinq places. Une mesure inspirée des Régates Royales de Cannes, adoptée pour limiter les manœuvres risquées de retour sur la ligne dans une flotte mêlant yachts classiques fragiles et unités modernes de haute performance.
Certains équipages en ont fait l’expérience, à l’image de Nanoq Final Final, théorique vainqueur de manche rétrogradé à la sixième place. D’autres, comme Albator, ont découvert la règle trop tard et payé une double peine en tentant de réparer immédiatement. Le jury rappelle qu’il faudra quatre manches validées chez les Modernes pour que les équipages puissent écarter leur plus mauvais résultat.
Mercredi, les Maxis observaient leur traditionnel « day off », une pause bienvenue après deux journées de régates intenses en baie de Pampelonne. Pour certains, ce fut l’occasion d’analyser les données collectées ; pour d’autres, de changer de voiles en vue d’un vent annoncé plus soutenu dans la deuxième partie de la semaine.
Cette trêve a aussi permis de réparer Galateia, le Wally Cento de David M. Leuschen, victime d’une collision en début de semaine et contraint de rejoindre La Ciotat. Bonne nouvelle : le voilier sera de retour jeudi pour la suite des compétitions.
En parallèle, les propriétaires de Maxis se sont retrouvés au mythique Club 55, pour saluer Patrice de Colmont, figure emblématique de la Nioulargue. Le lieu reste un symbole fort : c’est ici qu’en 1981, après leur régate inaugurale, les équipages de Pride et Ikra s’étaient réunis, donnant naissance à l’esprit festif et amical qui anime encore aujourd’hui Les Voiles.
Parmi les stars du plan d’eau, Magic Carpet e attire tous les regards. Avec ses lignes futuristes, son tableau arrière massif et sa robe bleu brillant, ce Wally signé Guillaume Verdier concentre l’innovation.
Ce maxi de 30,50 mètres est le premier de sa catégorie à pouvoir régater une journée entière sans recourir à son moteur thermique, grâce à un système électrique pensé pour l’autonomie. Sa quille basculante de 7 mètres et son bulbe pivotant permettent d’adapter le tirant d’eau, tandis qu’un plan de dérive original intègre un canard central pivotant. Avec ses deux safrans relevables et son mât reculé de 46 mètres générant un immense triangle avant, le bateau offre une combinaison quasi infinie de réglages.
« Nous avons navigué 120 jours depuis son lancement, mais nous apprenons encore chaque jour. » explique Danny Gallichan, boat captain fidèle de Lindsay Owen-Jones, l’armateur. Magic Carpet e participe au Trophée Edmond de Rothschild et illustre la volonté d’allier performance, technologie durable et élégance.
Ambassadeur BMW sur l’événement, Loïck Peyron est revenu sur ses premiers souvenirs tropéziens, datant de 1985, et sur sa vision actuelle du yachting. Pour lui, les Maxis doivent rester une affaire de monocoques : « Les multicoques ont leur place ailleurs, mais ici, l’esprit est autre. » Légèrement nostalgique, il confie son attachement aux classiques et à l’héritage de designers comme Herreshoff, plus encore que Fife.
La fin de semaine s’annonce riche :