Il y a des phares qui ont mauvaise réputation. Le phare de Tévennec, à la pointe de la Bretagne en fait partie, avec un soupçon d'horreur en plus, qui en ferait l'endroit idéal pour un film d'épouvante !

Très rapidement après sa mise en service en 1875, le phare de Tévennec s’est attiré une très mauvaise réputation. Phare maudit, lieu hanté par les fantômes de naufragés hurlants ou véritable enfer sur terre pour les gardiens du phare qui seraient tous devenus fous ou en seraient mort ?  Les rumeurs concernant le Phare le plus maudit de France sont aujourd’hui encore, bien présentes dans le folklore breton.

Situé au niveau du Raz de Sein, un détroit large de 8km et dont les courants violents en font un lieu dangereux pour la navigation, le phare de Tévennec fut le théâtre de nombreuses rumeurs depuis sa construction.

Tout aurait dégénéré au moment de la mise en service du phare.

L’administration des Ponts et Chaussées n’y a affecté qu’un seul gardien à l’origine, car il leur était difficile de classer le phare au milieu de ses congénères. Il n’est ni réellement un "Enfer" (phare de pleine mer), ni complètement un "Purgatoire" (phare installé sur une île) et ce n’est certainement pas un "Paradis" (phare du littoral).

Ne rentrant pas vraiment dans les standards de ces trois types de phares, il a été décidé, de manière assez arbitraire, administrative en fait, qu’un seul gardien y serait affecté à l’année longue comme pour les "Paradis", sur le seul critère que le fanal du phare était... petit ! Ce, alors que le phare de Tévennec est au cœur d’une zone difficile d’accès et éloignée des terres et qu’il aurait sans doute mieux bénéficié à obtenir au moins deux gardiens à l’année.

A sa construction, de drôles d’histoires ont commencé à en sortir. Les constructeurs entendaient des hurlements sinistres qu’ils finirent par traduire tels que : « Kers cuit ! Kers cuit ! Ama ma ma flag ! » une phrase en breton qui signifie « Va-t'en ! Va-t'en ! Ici c'est ma place ! ».

Le premier gardien, Henri Porsmoguer, n’aurait tenu que cinq mois avant de démissionner. Il aurait perdu la raison sous les hurlements qu’on entendait dans le phare, les jours de tempête. C’est le folkloriste breton Anatole le Braz, dans son œuvre « Le Gardien du Feu », qui aurait recueilli son témoignage, et aurait brodé tout autour l’histoire tragique d’un naufragé ayant trouvé refuge sur le rocher quelques années avant la construction du phare. Les courant violents empêchant qui-que-ce-soit de lui venir en aide, il aurait agonisé pendant quatre jours et trois nuits avant de mourir, seul sur le rocher.

Depuis ce temps, il hanterait l’île les jours de tempête, hurlant dès que les vagues se déchaînent un peu trop.

C’est ensuite Charles le Goffic, qui publie dans sa série intitulée « Les Phares », la sombre légende du Phare Maudit de Tévennec. On y découvre notamment l’histoire d’un exorcisme raté, d’un gardien devenu fou en croyant voir son père raflé par une lame, de gardiens morts mystérieusement ou ayant décidé de mettre fin à leurs jours et certains autres qui se seraient attaqué à leur propre famille, dans un accès de démence. 

Les rumeurs se voient donc appuyées par un écrivain sérieux, membre important de l’Académie française, et personne ne remet plus en doute la véracité des terribles histoires qui font désormais de Tévennec le Phare le plus maudit de France, que les gardiens fuient à tout prix.

Le phare a si mauvaise réputation qu’il sera d'ailleurs le tout premier de France à être automatisé dès 1910.

Dès lors, le phare n’a plus besoin de gardien, mais il ne perd rien de sa sinistre réputation qui aujourd’hui encore, fait parler les vieux marins, toujours persuadés que quelque chose de pas net se trame sur l’île.

Il faut attendre la fin des années 1990, pour que l’historien Jean-Christophe Fichou ne mette en lumière la réalité derrière les histoires sordides entendues à propos de Tévennec. Selon les archives de Quimper, aucun gardien ne serait devenu fou et aucun ne serait mort de manière mystérieuse. Le seul décès de gardien qui aurait eu lieu dans le phare serait dû à la santé dégradée de l’homme, qui était alcoolique.

Par ailleurs, les hurlements si particuliers à Tévennec s’expliqueraient par la présence d’une grotte sous-marine qui traverse l’îlot de part en part et qui produit, lorsque les vagues s’y engouffrent et que l’air en ressort, des hululement sinistres, tout-à-fait comparables à des cris.

Une histoire de Tévennec donc, bien moins effrayante qu’au premier abord, mais qui, pour peu qu’on croie aux fantômes, peut nous laisser sceptiques.