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Innovation - Fountaine-Pajot Samana 59 Smart Electrique x REXH2, pour un usage très spécial

Le plan Odysea 2030 Net Zéro Carbone de Fountaine-Pajot porte ses fruits et la société vient de présenter un nouveau prototype, le Samana 59 Smart Electric x REXH2, un catamaran électrique hybride série qui abandonne le générateur diesel au profit d'une pile à combustible EODEV.

Un voilier commandé par Trade-Winds, une société organisant des croisières à la cabine, qui se satisfont des inconvénients découlant des avantages de la propulsion de ce bateau.

Innovation - Fountaine-Pajot Samana 59 Smart Electrique x REXH2, pour un usage très spécial

Le Samana 59 est un très grand catamaran, doté d'une propulsion auxiliaire électrique série, dont les moteurs électriques (2x 50 kW) sont alimentés par des batteries (63 kWh) elles-mêmes rechargées par une pile à combustible Eodev, un générateur diesel, des panneaux photovoltaïques (6 kWc) et une/des éoliennes.

Sur ce bateau, le chantier a ajouté, au générateur diesel présent sur l'Aura 51 Smart Electric), une pile à combustible à hydrogène.

L'intérêt majeur se trouve dans le carburant, le dihydrogène, qui peut être produit à base d'énergie renouvelable, un carburant dont l'utilisation, dans une pile à combustible, ne produit que de l'eau pure et de la chaleur. Ces piles ne comportent pas de pièces en mouvement, et sont réputées silencieuses et peu émettrices de vibrations. Parfait pour la croisière à la cabine auprès d'un public peu marin.

Pour alimenter cette pile, d'origine Toyota (Mirai), un des actionnaires de EODEV, deux réservoirs contenant 15 kg de gaz sous forte pression ont été installés. La pile produit 70 kWh et les 15 kg d'hydrogène représentent 3,5 heures de fonctionnement soit 250 kWh.

Fountaine-Pajot insiste sur plusieurs avantages de cette configuration :

  • Le caractère propre du combustible, dénué d'effluents néfastes
  • Le silence de fonctionnement de la pile à combustible
  • L'autonomie électrique-hydrogène apportée au mouillage (40 heures)
  • Et celle en navigation à vitesse lente (10 heures à 5 nœuds)

Le choix du carburant et la pile à combustible EODEV

Les piles à combustible à l'hydrogène font beaucoup parler d'elles, mais il ne faut pas perdre de vue qu'il faut toujours près de 500 kWh pour produire 200 kWh de dihydrogène. L'origine de l'énergie mise en œuvre pour la fabrication de dihydrogène revêt une forte importance au risque de voir s'évaporer l'avantage "propre". Par ailleurs, les piles elles-mêmes sont des générateurs soufrant d'un rendement aussi faible que celui des générateurs diesel.

Ce carburant est difficile à stocker en forte quantité à bord, ce qui explique l'autonomie faible de ce bateau. Même si on évoque beaucoup l'hydrogène, le rechargement de ces réservoirs se fait, pour le moment, à part à Marseille, seul port national équipé d'une station H2, par transbordement depuis des camions équipés de réservoirs.

S'il ne parait pas infaisable d'obtenir le déplacement d'un tel camion sur la côte d'Azur ou dans l'un des grands ports Atlantique, il paraît difficile d'envisager la même chose depuis les zones de navigation que fréquentent habituellement ces bateaux (Antilles, Adriatique, Egée, Seychelles...). 

Trade-Winds, qui va exploiter ce bateau aux Antilles, va construire sa propre station de distribution d'H2. Une station qui pourrait être approvisionnée depuis la Barbade, qui va mettre en service une installation d'hydrolisation produisant du dihydrogène vert, à base d'énergies renouvelables.

Peut-être Tradewinds va-t-il inverstir à son tour dans une installation de fabrication d'hydrogène ? Nous l'ignorons au moment d'écrire ces lignes.

Une autonomie très faible 

Avec dix petites heures annoncées à 5 nœuds, et les 63 kWh de batteries LiFEPO4, l'autonomie au moteur du voilier lors d'une croisière d'une semaine en prend un sérieux coup quand on la compare aux centaines d'heures d'autonomie d'un catamaran diesel ou hybride série diesel-électrique.

Mais la pile à combustible est également capable d'alimenter les services hôteliers (électronique, air conditionné, cuisson, eau chaude, pompes...) pendant 40 heures, le temps d'une croisière d'un week-end...

Pour pallier cette très faible autonomie, et garantir une autonomie suffisante, le bateau embarque également un générateur diesel ainsi qu'un réservoir diesel dédié. Un générateur diesel qui nécessite son plan de maintenance et qui produit, lui, des fumées.

Un profil d'utilisation très spécifique

Le programme de navigation de Trade-Winds aux Antilles se compose de courtes navigations. Le tour d'Antigua, une croisière entre St-Martin, Anguilla et St-Barth, ou encore une dans l'archipel protégé des BVI.  Les phases de navigation sont courtes et le recours au moteur peut-être très réduit.

Ce programme s'apparente à celui des daytours, la nuit au port en moins.

La faible autonomie au moteur est alors suffisante pour couvrir la dizaine de milles qui séparent, dans le pire des cas, le bateau de la sécurité d'un abri. 

La présence d'un groupe diesel met bien en lumière le point faible que constitue l'autonomie de ce bateau.

Exploité par Tradewinds, ce voilier va utiliser ses moteurs quelques minutes par jour, le temps de quitter ou de prendre un mouillage. Si la navigation est ensuite effectuée à la voile, la production photovoltaïque (40-60 kW /jour) et l'hydrogénération (5-20 kW ?) doit probablement parvenir à recharger les batteries de propulsion tout en assurant l'alimentation des consommateurs puissants des services hôteliers (le seul air conditionné doit consommer entre 8 et 10 kWh à plein régime), sans trop recourir au générateur.

La pile est destinée à apporter un supplément d'autonomie aux batteries, que ce soit pour la propulsion ou pour les services hôteliers.

C'est le profil très particulier de ce genre croisières, en zone protégée et à court rayon d'action qui permet d'envisager l'utilisation principale de la pile plutôt que celle du générateur.

Le générateur diesel est installé pour conserver ses possibilités de manœuvre au bateau, dans tous les cas de figure, un besoin impératif pour un opérateur professionnel.

 

La densité énergétique de l'hydrogène ainsi que les difficultés posées par son approvisionnement freinent considérablement son développement à bord des navires de plaisance, en les frappant au cœur, à savoir à leur autonomie. 

Le navire Energy Observer, qui a ouvert la voie à ces piles à hydrogène embarquées sur les bateaux, équipé d'une telle pile, possède une caractéristique très difficile à transposer sur un catamaran de plaisance : sa capacité de générer son propre hydrogène, en route, de manière autonome.

En cause, une puissance photovoltaïque énorme (34 kWc) et éolienne (2 kW), capables de pomper, filtrer, assainir puis hydrolyser et compresser l'eau de mer pour en faire de l'hydrogène. En cause aussi, la sobriété énergétique des services hôteliers d'Energy Observer, deux avantages très difficiles à transposer sur un prototype catamaran de croisière.

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